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12 novembre 2011

Ma première peur.

J’avais 15 ans peut-être, je commençais à sortir seule le jeudi après-midi pour aller au cinéma, souvent avec ma meilleure amie. Ce jour-là, j’étais seule. Je me rendais dans un petit cinéma (qui n’existe plus depuis longtemps) rue de Douai, près de la place Clichy. J’étais partie très en avance, pour quitter au plus tôt l’appartement et faire du lèche-vitrines rue d’Amsterdam. Je remontais donc la rue lentement, freinant devant chaque devanture. Soudain je me rendis compte qu’un homme me suivait, s’arrêtant en même temps que moi, à quelques mètres, me regardant avec insistance, et repartant comme moi dès que j’avançais. Aussitôt je fus inquiète. Cela ne m’était encore jamais arrivé, et j’imaginai le pire, mais quel pire ? Je ne songeais à rien de précis, c’en était d’autant plus effrayant. Mon cœur battait, mes jambes tremblaient, j’osais parfois lancer un coup d’œil rapide en arrière : il était toujours là, à la même distance.

J’arrivai enfin devant le cinéma, très inquiète : allait-il y entrer aussi ? Je pris comme d’habitude une place de « première » et entrai dans la salle. Il y avait fort peu de monde. Je m’installai au fond et commençais à peine à respirer quand, horreur, je vis l’ouvreuse le diriger vers les premiers rangs, les « secondes » moins chères. Dieu merci, il avait dû hésiter devant la dépense et se contenter d’une mauvaise place. Ma peur me reprit : assis au troisième rang, sous l’écran, il s’était tourné vers moi et me fixait avec insistance. Mais les lumières s’éteignaient, les actualités commençaient, la salle était maintenant plongée dans le noir, j’étais seule, personne ne me viendrait en aide, qu’allait-il m’arriver ? Impossible de suivre ce qui se passait sur l’écran, et le documentaire au programme défila sans que je sois capable d’y prêter attention. L’entracte arriva. L’homme était toujours là, il n’avait pas osé quitter sa place (l’ouvreuse veillait et décourageait les resquilleurs) mais il était encore tourné vers moi. Enfin le film commença, je n’ai aucun souvenir de ce que c’était, mais l’histoire parvint à retenir mon attention et j’en oubliai le danger qui me guettait. Quand le mot Fin s’inscrivit sur l’écran, je constatai que l’homme avait disparu.

Plus jamais je n’eus peur comme cette première fois. Pourtant je fus suivie bien des fois, accostée aussi, dans les années qui ont suivi. Avoir eu si peur ce jour de mes 15 ans, où mon imagination avait amplifié un fait banal, semble avoir fortement atténué en moi le réflexe de peur. Si bien que les deux fois où j’ai été vraiment agressée, je n’ai pensé qu’à me défendre, une fois par la parole, l’autre fois en me débattant avec vigueur. C’est après coup, rentrée saine et sauve chez moi, que la réaction a lieu : je vois mes mains trembler. Aurais-je donc eu peur sans m’en rendre compte ?

 

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Commentaires
A
Eh ben dis donc! 15 ans ! Mais tu as eu bien de la chance d'être admirée, désirée si jeune!<br /> Enfin, c'est une façon de parler car tu m'as presque foutu la trouille à me parler ainsi de ta peur, pauvre Mimi!<br /> Hélas! moi, on ne me s!uit plus. Hélas, hélas! hélas!<br /> Je t'embrasse la Belle,<br /> Gigri
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  • un aperçu de ma passion pour l'écriture : des nouvelles, des récits courts, des anecdotes autobiographiques, l'aventure de mon premier roman, mes ateliers d'écriture, des souvenirs de vacances en Bretagne, des citations, mes lectures
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